Exosquelette de Maja brachydactyla. H 50 × L 50 × P 12 cm · 5,6 kg
La couronne.
Il était arrivé en fin de saison, quand les feuilles mortes étouffent les sentiers forestiers et que la brume ne se lève plus tout à fait. Le barrage, vieux d’un demi-siècle, retenait une eau lourde, sans rides, sans éclat, une plaque de plomb étendue entre les collines. Le lieu n’avait pas de nom, ou s’il en avait eu un, il s’était perdu dans l’eau.
Officiellement, il venait cartographier les structures du village englouti lors de la mise en eau et modéliser l’ancienne église noyée. Personne ne l’attendait vraiment. Le responsable du site lui avait laissé les clés d’un pavillon vide, un plan approximatif des ruines, et un mot laconique sur la table : « Le clocher est toujours debout. Ne descendez pas seul. » Il ne se posa pas de questions, il venait juste cartographier les structures immergées.
Il passa deux jours à s’installer. Le pavillon était simple, presque monacal. Une chambre, un bureau, une cuisine nue, et une grande vitre donnant sur le lac. Il tenta de travailler. Il disposa les cartes, consulta les relevés, ajusta les coordonnées. Mais quelque chose le perturbait. Pas la solitude il la cherchait, pas le silence il l’aimait. Non, c’était autre chose, une sorte de décalage, comme si ce lieu n’était pas tout à fait synchrone avec le monde. Les heures glissaient, les ombres tombaient trop vite, et toutes ses montres, même les plus fiables, se décalaient de trois minutes, exactement trois.
Le troisième soir, il resta éveillé, non par insomnie mais par vigilance, comme si son corps se souvenait d’un danger inconnu. Rien ne bougeait, pas d’insectes ni d’oiseaux et pourtant quelque chose battait. Ce n’était pas un son, mais une fréquence. En passant la main sur la vitre il ressentit une vibration imperceptible. Il sortit.
Le lac figé sous la lune ne trahissait rien. À l’horizon une ligne pâle se dessinait traversée en son centre par une pointe de pierre, le clocher. Droit, muet, comme posé sur l’eau depuis toujours. Là il entendit trois coups très espacés, sourds et profonds. Il sentit dans sa poitrine trois battements exactement calés sur le son. Il consulta les relevés, rien. Pourtant les capteurs indiquaient : 0,033 hertz, trois fois par minute. Il s’assit, prit un stylo et sans réfléchir, traça un cercle, puis un deuxième, puis un troisième, trois cercles parfaits. Il les regarda longtemps avant de s’allonger dans le noir.
Le lendemain, il choisit de plonger. Pas de sonde, pas de drone. Juste lui. Il attendit la fin du jour, quand la lumière bleuit et que le lac se confond avec le ciel. Il vérifia sa combinaison, les bouteilles, la lampe, tout était en ordre, tout était calme. Il entra dans l’eau. Elle était tiède, presque douce, comme si elle l’avait attendu. Il descendit lentement, les premières formes apparurent sous le faisceau de sa lampe : les murets éventrés, les toitures effondrées et les fragments de vitraux figés dans le limon. La lumière glissa sur les pierres des colonnes et sur le dallage silencieux. L’église était là, entière, comme posée sur le lit du monde. Le clocher, lui, disparaissait lentement vers la surface.
Et là, au fond où se dressait l’autel, il la vit. Une couronne suspendue dans l’eau, immobile, rayonnante, silencieuse. Chacune de ces épines diffusait une douce clarté presque sacrée. Elle pulsa trois fois, puis le silence. Là, il sut qu’elle avait toujours été là. Il s’approcha, son cœur ralentit, s’accorda et obéit. Il vit des lignes en elle, des cercles, des figures enfouies et des signes sans nom.
Sa lampe s’éteignit. Le détendeur, lui, se tut. Plus d’air, plus une bulle. L’eau devint parfaitement silencieuse. Il aurait dû ressentir la peur, mais il n’y avait plus de place pour elle. Combien de temps cela prendrait, il l’ignorait. Il savait seulement qu’une noyade n’était jamais immédiate. Il ne paniqua pas. Ou peut-être que si. Mais c’était déjà en train de passer. Les muscles réagissaient : mouvement, résistance, puis fatigue. Ce n’est pas possible, pensa-il. Et pourtant, l’eau entrait par la bouche, le nez, les yeux, elle gagna les poumons et envahissait tout.
Il tenta encore un geste, un appel. Rien ne remonta. Le temps devint instable, les repères se diluèrent. Le corps se relâcha, les membres cédèrent, les poumons se figèrent. L’eau n’était plus un obstacle, elle contenait tout. Il crut entendre une voix, ou s’en souvenir. Mais cela n’avait plus de forme, ni de sens. Tout s’effaçait, le temps, la peur, la douleur se dissipait comme la lumière.
Puis plus rien, rien que le liquide et le silence.
Sous la douce lumière émanant de la couronne, son corps se posa au pied de l’autel, comme prosterné, le front contre le dallage de pierre. Elle ne l’accueillait pas, ni ne l’attendait, elle le devinait, comme on reconnaît une présence familière.
Il ne se souvint pas être remonté. Pourtant il était là, assis dans le pavillon. Il recommença à dessiner les mêmes formes, trois cercles. Aujourd’hui encore, il descend souvent au bord de l’eau, il reste là des heures entières. Certains disent qu’il trace inlassablement les mêmes signes. Et parfois, quand le vent se lève, on entend sous la surface trois coups très lents, très profonds. Comme si quelque chose appelait toujours.
Observations spéculatives :
“Ce spécimen demeure l’un des objets les plus énigmatiques de la collection. Il ne parle pas. Il ne se déploie plus. Mais sous certains éclairages, dit-on, une lueur diffuse subsiste, presque imperceptible au cœur de la couronne.”
Prof. Charles Warding, Observations abyssales, vol. II, manuscrit , vers 1937.
Systématique :
Faute de données génétiques, la classification de Chymaera corona sanctus major repose uniquement sur des critères morpho-fonctionnels. Sa symétrie radiale et sa structure dermique suggèrent un rattachement provisoire aux Deuterostomia, à la frontière des Echinodermata et Cnidaria. Certains auteurs envisagent toutefois une lignée entièrement divergente, voire non animale.
Statut :
Spécimen fossile certifié, identifié à partir d’un exemplaire unique exhumé en contexte bathyal. L’existence d’une forme vivante est hypothétique, étayée par des signaux lumineux abyssaux et des dépôts organiques atypiques, sans confirmation directe à ce jour.
Étymologie :
Le nom Chymaera renvoie à la figure mythologique de la chimère, soulignant la nature hybride et indéterminée du spécimen. Corona sanctus (couronne sacrée) fait référence à sa morphologie annulaire et aux interprétations symboliques attachées à son apparition. L’épithète major désigne la plus grande forme connue du groupe.
Morphologie générale :
Retrouvé sur un lit de sédiments, le spécimen présente une structure annulaire rigide, blanche et crayeuse, d’un diamètre compris entre 42 et 48 centimètres. Son corps est formé de bras soudés entre eux, recouverts de fines excroissances calcifiées évoquant les ossicules dermiques typiques des échinodermes.
La zone centrale, creuse, ne présente ni cavité interne ni orifice fonctionnel identifiable. Aucune trace d’appareils digestif, reproducteur ou nerveux n’a pu être mise en évidence. Toutefois, l’examen microstructural a permis de révéler un ensemble de canaux radiaires fossilisés, disposés selon un motif récurrent, laissant supposer l’existence d’un réseau interne aujourd’hui disparu.
Des analyses élémentaires menées sur les dépôts minéraux de ces structures ont mis en évidence des concentrations atypiques en arsenic (As), sélénium (Se) et zinc (Zn), éléments fréquemment impliqués dans des processus de signalisation biochimique et de conduction ionique chez les organismes extrêmophiles.
Ces observations convergent vers l’hypothèse d’un système de perception décentralisé, analogue aux réseaux nerveux primitifs des cnidaires, ou à certaines formes de transport axoplasmique diffus. Ce dispositif aurait pu permettre une coordination locale des signaux sensoriels et métaboliques, sans recourir à un centre de traitement unique.
L’absence d’organe digestif, conjuguée à une surface externe poreuse et étendue, suggère un mode de nutrition transcutanée, par absorption directe à travers l’épiderme minéralisé. Une autre hypothèse envisage une photoréaction chimique, où la lumière ambiante aurait agi comme vecteur énergétique, via une conversion biochimique spécialisée.
Cycle de vie supposé :
L’organisation radiale du fossile suggère une reproduction par scission segmentaire, chaque bras étant potentiellement capable de générer une couronne secondaire par duplication inversée. Ce mécanisme, encore hypothétique, traduirait une stratégie d’auto-réplication asexuée adaptée à des environnements extrêmes, isolés et peu stables.
Certaines modélisations lumineuses croisées avec des témoignages anciens, notamment les relevés nocturnes du capitaine H. Le Mée (Carnet de bord, Trégor, 1906) et les annotations marginales de la naturaliste Ada Thorne (expédition Pontus IV) laissent entrevoir l’existence de formes juvéniles photogéniques, se nourrissant non pas de matière, mais de lumière elle-même. Leur développement semblerait corrélé à l’intensité des ondes qu’elles émettent ou perçoivent.
Bioluminescence résiduelle :
L’analyse spectroscopique du spécimen fossilisé a révélé la présence de micro-inclusions pigmentaires, disposées en rosettes régulières à l’extrémité des bras. Ces structures fossiles pourraient correspondre à d’anciens photocytes, organisés selon un motif radial caractéristique des systèmes neuro-sensoriels lumineux.
Des signatures spectrales résiduelles dans la bande 420-460 nm, avec un pic marqué à 432 nm, indiquent une émission directionnelle, possiblement liée à la signalisation optique ou au mimétisme spectral. La régularité des motifs suggère un cycle ternaire pulsé, aujourd’hui éteint, mais suffisamment structuré pour évoquer un langage lumineux codé, destiné à des interactions interspécifiques.
Plusieurs archives maritimes font état de l’apparition soudaine de cercles lumineux sous la surface, désignés sous le nom de Corona Silentii. Ces manifestations sont souvent associées à des naufrages, à des disparitions inexpliquées, ou à des états de transition entre la conscience et sa perte. Les rares témoins d’une proximité directe avec la forme lumineuse rapportent des perturbations sensorielles aiguës : ralentissement du temps perçu, désorientation spatiale, sensation de vide auditif absolu.
Résonances symboliques et interprétations rituelles :
Le nom vernaculaire Corona Sancta apparaît dans plusieurs manuscrits oubliés de naturalistes mystiques du XVIIIe siècle. L’organisme y est décrit comme un vestige d’un règne antérieur, une couronne fossile remontée du fond du monde, visible seulement à de rares initiés.
Des traditions orales, notamment parmi les marins malgaches et celtiques, évoquent les Couronnes de Morts, anneaux d’écume tournoyant lentement au-dessus des épaves récentes. La chimère y est perçue moins comme un être vivant que comme un sceau, trace du pacte entre le vivant et l’abîme. Son apparition signale un seuil, une mutation invisible dans l’ordre du monde, la disparition, la révélation, ou l’oubli.
Pétroglyphe supposé de la Chymaera Corona Sanctus Major, gravé sur une paroi basaltique (expédition Pontus IV, Madagascar, 1897).(image IA)
Hypothèses extrêmes :
Certains chercheurs minoritaires avancent l’hypothèse selon laquelle Chymaera Corona Sanctus Major ne serait pas un organisme autonome, mais plutôt un organe sensoriel dissocié, vestige d’un macro-organisme encore inconnu, peut-être dissimulé dans les profondeurs océaniques. Dans cette perspective, la Corona ne ferait qu’enregistrer, percevoir, mémoriser. Elle ne se nourrirait pas. Elle ne se déplacerait pas. Elle existerait uniquement pour ressentir.
Commentaires
9 réponses à “Chimaera Corona Sanctus Major”
bergeon
Monsieur le professeur,
Je me présente, je suis l’archevêque de Reims, monseigneur Landriot.
Je me suis enthousiasmé par vos recherches sur les crustacés, car la Providence divine à orienter vos recherches confirmant le lien étroit entre la nature et Dieu. Il est certain que l’abus de la science a produit souvent sur l’intelligence les effets les plus déplorables : elle a donné à l’esprit une tournure d’originalité et une tendance funeste à la bizarrerie, à ce que l’on appelle les idées excentriques et souvent extravagantes. Jamais cet excès n’ont été plus communs qu’à notre XX° siècle ; jamais on a rencontré des esprits faux, des intelligences hérissées de sciences exactes. De là ces rêveurs absurdes, ces faiseurs de théories ridicules, ces fabricateurs de systèmes sociaux des socialistes de gauche et de droite reposant sur quelques formules chimériques : de là ces conceptions philosophique que l’apôtre compare à des nuées sans eau, parce qu’elles ne promettent à l’avenir que des vents et des tempêtes. L’abus de la science et de son objectivisme ne produit pas toujours un effet aussi funeste pour la société : il ne fait qu’attaquer les facultés intellectuelles de l’individu. L’esprit prend une fausse direction, et arrive successivement et presque sans s’en douter aux conceptions les plus singulières et les plus bizarres. C’est un voyageur qui a fait une fausse route au point de départ, et qui se perd ensuite dans un labyrinthe. Dès lors plus d’ordre dans les idées, plus de justesse dans les appréciations, c’est un chaos de pensées incohérentes, une confusion de lumière et de ténèbres comme aujourd’hui avec la post-modernité et le multiculturalisme. Enfin vous êtes là, cher professeur pour remettre le Christ et le christianisme dans la société sans foi et sans avenir.
Avec toute ma reconnaissance et toute mes salutations
Mgr Landriot
Centre de Santé Mentale
Chambre 33 – Cellule 666
27 route de Bouchemaine
49700 Sainte Gemmes sur Loire
Et si perdu dans le Labyrinthe, Dieu était ce voyageur, faisant fausse route au point de départ, portant sur son dos un sac Quechua rempli de créations divines ?
Oui, l’humanité semble emprunter un chemin tumultueux, devant affronter de puissantes nuées de vents qui balayeront les eaux de la mer.
La vie se joue de l’humanité et de son Dieu, tout comme les épreuves auxquelles Moïse et son peuple étaient confrontés dans leur quête de liberté et de foi.
Que notre destinée se dessine telle une épopée, rappelée par les enseignements et les miracles passés, où la foi et la détermination nous guidèrent vers la lumière, telles les colonnes de feu et de nuée guidant les Hébreux dans l’obscurité du désert…
Je passerai dès que possible au Centre de Santé Mentale pour vous faire conversation en votre cellule.
Monsieur Dhennin,
Je me permets d’ajouter un commentaire à cette œuvre remarquable liant enfin l’art et la religion naturelle de Schelling. Vous n’êtes pas sans savoir qu’en 1837, dan Les voix intérieures, Hugo, s’apitoyait de voir qu’à mesure que le progrès avançait « l’écho de la voix de Jésus s’en allait en s’affaiblissant. » Puis vint les terribles anticléricaux, après L’année terrible. Au « Christ, assez ! » des anticléricaux, succède aujourd’hui le crustacé !
J’ai ouvert plusieurs fois votre site pour admirer cette couronne d’épines très singulière et vraiment magnifique. Oui, vous ravivez en moi toutes les lectures sur l’art que j’avais faites encore étudiant. Votre chimère, la « Chimera corona sancus major », peut être installée dans une chapelle ou une église, ou être admise dans un musée, sans procurer aucun « malaise » ajouterait Jean Clair, – conservateur de musée et organisateur d’expositions internationales -. Vous renouez avec l’art, non l’art de type essentialiste, mais avec la poïesis de l’œuvre, et en même temps vous réorientez l’art hors du bourbier nauséabond dans lesquels les artistes contemporains se sont englués et enlisés.
C’est une entreprise hardie que de dire aux critiques d’art et aux histrions de l’art Contemporain que leurs écrits et leurs œuvres sont peut de choses. L’art a cessé d’exercer ses fonctions spirituelles qui se trouvèrent magnifiées par l’esprit absolu du philosophe allemand Hegel. Les Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme de Schiller ne servent plus à rien. Où est l’art qui répandait ses lumières naturelles sur notre ignorance ? Hélas, comme dirait l’exilé de Guernesey, Hugo, il est enfoui dans la fosse commune des artefacts. L’art Contemporain nous convainc de notre bassesse et de notre fatuité. Les professionnels s’ingénient par mille moyens inconcevables à faire croire au public que l’art n’est pas mort. Il semblerait qu’après des mouvements de libération incalculables, – des mouvements qui veulent se dépêtrer du mouvement dont ils sont issus -, puisque ces mouvements ne peuvent pas se libérer de l’idée de libération, on soit parvenus à faire de la mort un véritable tabou. Comme le disait l’illustrissime et l’éminentissime évêque de Meaux, Bossuet : « C’est une étrange faiblesse de l’esprit humain, que jamais la mort ne lui soit présente, quoiqu’elle se mette en vue de tous cotés, et en mille formes diverses. » Nous ne pouvons pas assister à la mort de l’art en direct dans le journal de 20 heures, nous qui sommes friands d’informations quotidiennement, car personne ne songe à sa mort, ou tout bonnement, les journalistes craignent d’annoncer cette nouvelle qui abasourdiraient plus d’un esthète. Une culture sans art est inconcevable. Tout a été fait pour que l’on se réjouisse de cet art éphémère qui n’en finit pas de trépasser en donnant des signes de vitalité lors des esclandres de rabat-joies.
Comme vous évoquez l’histoire du bar de « Mémé Germaine », à Camaret-sur-Mer, j’ai exploré le site de ce village breton situé dans le Finistère. L’histoire de l’église Saint Rémi est largement annotée et de nombreuses s photos des vitraux et des statues des saints sont exposés. En regardant la sculpture de Saint Ryok – saint breton ermite à l’origine du culte de Saint-Rémi en Camaret , qui tient dans ses bras un homard, et un énorme bâton où sont sculptés des algues -, j’ai pensé à la babiole pour enfant installée au château de Versailles : le homard rose bonbon de Jeff Koons. Que s’est-il vraiment passé entre ces deux œuvres si éloignées dans le temps ? Je cherche plus à comprendre, car je suis avant tout un poète, et un poète est hors du siècle, tout en vivant avec son siècle. Breton, Char, Eluard, Garcia Lorca, Jaccottet, Pasolini, Ponge, Rilke, Saint-John Perse, Valéry, m’initièrent à la poésie moderne et contemporaine. Ponge est un adversaire de toute métaphysique, de toute idéalité, de Pascal, du pessimisme, et de l’histoire. Il préfère regarder les objets qui sont autour de lui pour ne pas penser. Un jour, que je lisais le poète des choses : Francis Ponge, l’inspiration m’est venue subitement, en regardant un pot de cornichons. Il était posé devant moi, et sans rien dire, il captait mon attention. A la différence de Ponge, je me suis mis à penser en contemplant ce bocal. C’est ainsi que j’ai composé un poème avec des pensées qui me préoccupaient tout en fixant cet objet banal. Comme la mer, le milieu maritime, les fossiles marins et le respect de la nature sont vos sujets de prédilection, et que vous avez réintroduit l’acte d’œuvrer dans vos créations, totalement absent de la création contemporaine, j’ai pensé que cela pouvait vous intéresser. Voici le poème :
Combien d’artistes qui ont perdu la boussole,
Se sont jetés dans la contemporaine aventure.
Combien d’illuminés se tournant vers le futur,
Se sont embarqués dans cette nef folle.
Combien de cervelles qui gondolent,
Ont navigué avec une belle camisole,
Abandonné à leur chimérique destinée,
En entonnant des hymnes à leur liberté !
Nombreux se sont cru des gondoliers
Donnant des leçons de navigation.
Alors qu’ils n’étaient que des flibustiers
Qui se sont échoués sur les définitions !
Nombreux, ce sont envolés
Dans les vaisseaux de Bosch,
Vers ce qu’il y a de plus moche !
Nombreux, ce sont envolés
A l’aide de la nouveauté,
Ramant avec l’onde mutinée
Pour se croire inspiré,
Sans rien maîtriser,
Gouverné par la seule cécité de créer.
Les mots et les choses nous mènent en bateau.
Je ne veux pas être emporté à tous les vents,
Me perdre à tous les flots changeants,
Me considérer comme un naufragé du Beau.
En m’orientant vers d’autres contrées,
Suivant d’autres allées et d’autres voies,
Je me suis dit, tout affligé,
En regardant l’aube poindre d’un bel endroit :
Si j’aime le son du cor le soir au fond des bois,
Je n’aime pas le son du cornichon
Qui s’en donne à cœur joie !
Monsieur, je vous raconte une anecdote peu banale. J’ai demandé à mon dentiste de me mettre une couronne ayant la même forme que la « Chimera corona sancus major ». Au lieu de me répondre, le dentiste a pris sa roulette, me l’a enfoncé dans la molaire, et m’a fait mal le chameau. Il n’aime pas la plaisanterie. Je voulais juste un petit renseignement ; est-ce qu’il existe des « chimera » à deux bosses qui peuvent traverser les mers ou les lacs asséchés par les hommes irrespectueux de la nature ou aujourd’hui, par le réchauffement climatique ? J’ai entendu dire qu’en Amazonie, après la déforestation et les pluies, il se formerait des mares, où une nouvelle espèce de crabe à bosse est née : « Chimera bossa nova. »
Cordialement
Lors de l’exposition de vos œuvres au salon de Dinard qui eut lieu cette année 2023, j’ai longtemps contemplé la« Chimaera corona sancus major ». Puis réflexion faite, je me suis posé la question suivante : « Est-ce que vous accepteriez que l’on plonge la « Chimaera corona sancus major » dans l’urine, afin que l’on parle de vous dans les journaux ? » La liberté que l’on proclame partout avec l’art Contemporain, avec le bobard que l’art n’a jamais été aussi libre, est une liberté sans bornes et sans limites. La liberté s’est aussi de savoir se limiter et de réfléchir pour ne pas faire n’importe quoi. Lorsqu’une autorité impose une limite, elle est associée à une censure et quand l’on s’offense, on est accusé d’être rétrograde et arriéré. Il n’y a plus de juste milieu, ni de bon sens, il n’y a que cet idée d’avancer et de progresser qui nous aveuglent et qui nous contentent à la fois dans la plus légère insouciance du lendemain, le futur appartenant aux gens qui osent tout.
Je ne vous ai pas posé cette question embarrassante. Pourtant, je pensais à une œuvre exposée à Avignon : « Immersion Piss Christ » d’Andres Serrano. Il mit un énorme crucifix dans un aquarium empli d’urine. Franchement, on a pris les visiteurs de cette exposition d’art Contemporain pour des jambons. Il ne faut pas imaginer qu’Andres Serrano a réalisé une performance où il aurait pu se déguisé en jambon, comme jadis son ainé, le dadaïste suisse Hugo Ball en sardine. L’idylle du jambon et de la sardine aurait pu être un conte de fée contemporain, mais l’artiste avait semble-t-il des problèmes de prostate. Cette œuvre provocatrice a été saccagée par des néophytes de l’art Contemporain. Ils ont fait comme les artistes de l’Actionnisme viennois, – les précurseurs de l’Art Corporel – , ils ont brisé le vitrage de l’aquarium en piquant une grosse colère comme Otto Muehl, comme César devant ces compilations ou encore comme Arman avec ses accumulations. Chose curieuse, cette performance et ce happening a heurté les critiques d’art et même les journalistes qui en ont appelé à Voltaire : « Voltaire ! Voltaire au secours ! » La meute des journalistes s’est indigné de cet autodafé qui aurait pu être pratiqué de l’Inquisition espagnole et ont dénoncé le geste infâme et inqualifiable de cette performance.
L’art contemporain est devenu un art officiel, encouragé par le ministère de la Culture. En fin de compte, il a remplacé l’art Académique du Second-Empire et de la III° république, mais est-ce que l’on y a gagné au change ? Là est la question nous dirait ce brave Shakespeare qui aimait mieux gambader dans les cimetières à la recherche d’ossements pour penser à contre-courant des latitudinaires et des philosophes prêchant l’indifférence en matière de religion. Ces journalistes et ces critiques d’art ne sont pas accoutumés aux outrages de leurs conceptions de l’art. Ils savent trop bien que le monde est porté à croire que les novateurs que l’on condamne ou juge sévèrement, finissent par imposer leurs créations artistiques. Les premiers novateurs et authentiques dadaïstes se faisaient pourtant malmener par la presse, par la société et ils ne composaient pas avec elle.
Aujourd’hui nous savons que les acteurs de cette performance étaient des intégristes appartenant à une association de catholique pro-royaliste, pétainiste et dont les références s’appuyaient également sur des noms de la collaboration. Elle s’opposait à l’art Contemporain, au spectacle obscène du théâtre du Rond-Point à Paris, au transhumanisme, au mariage pour tous, etc. ; en règle générale à toute l’idéologie mondialiste et son « politiquement correct. »Elle a été dissolue récemment par le ministre de l’Intérieur avec le décret du 4 octobre 2023.
Le hasard fait bien les choses, j’ai lu les commentaires d’Arthur Sansonnet sur votre site. Figurez-vous, que ce poète avait laissé sur le livre d’or de l’exposition d’art Contemporain se tenant à Avignon, un poème. C’est pourquoi, j’ai pris l’initiative de consigner une précision salutaire au bon sens et à la conscience de la liberté de la philosophie classique, car il y a des choses qui me froissent avec les conclusions des sciences humaines et inhumaines.
Lors de cette performance digne de l’Inquisition, le poète Arthur Sansonnet était là. Il a recueilli ses troubles dans un poème que j’ai recopié. Je vous le livre son témoignage, bien qu’il ne s’offusquât point de cette prouesse, mais plutôt de l’odeur qui embauma les salles de cette exposition.
Après un fracas inattendu,
Nos regards se détournèrent,
Vers l’objet délétère,
Détruit par des inconnus.
Hum ! Pour nos narines, quelle overdose.
Ce parfum ne sent pas la rose.
Hum ! Cela sent même autre chose,
Qui si j’ose dire, nous indispose.
Quel relent ! Pas besoin d’explication,
Cela sent la station d’épuration !
Assurément, cette odeur de vidange dérange.
Cette œuvre ne mérite aucune louange.
Elle ne sera jamais en odeur de sainteté !
Où est le vent qui fait naître les roses ?
Nulle part, il faut toujours autre chose !
Et prendre le parti des choses !
Ah ! Toutes ses remises en cause de Sélavy… Rose !
Etrange conjoncture que l’esthète endure,
Car cet art n’est que de la littérature !
L’amour des roses laissent la place à l’imposture.
Déplaisante aventure qui nous fait perdre notre latin,
Mais qui éblouit les yeux de lointains, les philistins,
Et les nains de jardin de monsieur Jourdain.
Inhumain, trop inhumain est l’art Contemporain !
Serein, trop serein, cet art a voulu nous mettre au parfum !
Mais voilà, réflexion faite, cette odeur nous contraint d’admettre un point de vue unique qui n’est pas de l’ordre du langage : soit le bon point de vue que les critiques littéraires et les philosophies du langage ont éliminé. Les sémiologues et les linguistes qui prétendent qu’il y a une inadéquation du langage et de la réalité, se sont plantés en croyant à une pluralité d’interprétation d’une œuvre, et par conséquent, à l’inexistence d’une réponse unique et véritable qui serait la bonne. L’odeur désagréable de cette urine croupis dans son aquarium procure un démenti formel qui bouleverse la révolution copernicienne des sciences humaines et inhumaines ! Cette odeur impose son point de vue sans se préoccuper de ce que je pourrais imaginer. Je pense que de tout temps, un visiteur ferait la même approche réceptive. La perception esthétique et les jugements esthétiques de l’art traditionnel ont été rejetés par la critique contemporaine, puisque l’esthétique pense toujours trouver la raison d’être de l’art dans une apparence sensible. Nous ne pourrions pas expliquer la manière de correcte de percevoir et de juger. Cette odeur apporte un démenti catégorique à cette conception ! Ce point unique vient-il contredire la liberté d’expression car tout le monde produirait une réponse identique ? Non. Le bon sens n’aime pas le n’importe quoi, il s’est noyé dans le relativisme admis par l’objectivisme des sciences humaines et inhumaines, alors que la notion de bon sens a toujours été quelque chose sur lequel la conscience ordinaire et la philosophie cartésienne pouvait s’appuyer pour argumenter raisonnablement.
Il semblerait que le bon sens soulève une contradiction de sens que personne n’a jamais dénoué. A partir de ce dilemme, soit on poursuit dans la voie de l’inadéquation du langage avec la réalité comme certains écrivains et poètes l’ont fait, soit on s’évertue, comme Sartre, de « rétablir le langage dans sa dignité ». Ainsi les professionnels des sciences humaines et inhumaines devraient réviser leur théorie et acquiescé à celle de Sartre et celle de la Logique du Port-Royal, sans quoi leur théorie deviendrait intolérante!
Vous exprimez une réflexion sur l’art contemporain et la perception esthétique, illustrant comment une odeur dérangeante remet en question les idées sur la pluralité d’interprétations artistiques.
Vous semblez encourager la révision des théories des sciences humaines et la reconnaissance d’une perspective rétablissant la dignité du langage.
Par coïncidence, ce soir je dîne avec mon ami Julien Dray. Je lui soumettrai votre lettre accompagnée de toasts aux œufs d’esturgeon…😉
(Dans une galerie d’art, Clovis Lebénitier et Mgr Landriot se trouvent face à une œuvre abstraite.)
Clovis Lebénitier :
Parbleu, Mgr Landriot, cette odeur rebelle défie toute raison, tel un tyran olfactif dans l’arène des esthètes.
Mgr Landriot :
Ah, Monsieur Lebénitier, cette fragrance insolente, telle une farce artistique, se rit de nos sens et nos interprétations.
Clovis Lebénitier :
Elle s’élève, sans l’ombre d’un doute, en une raillerie à l’égard de notre bon sens, serait-ce là l’humour singulier d’un parfum artistique ?
Mgr Landriot :
Un parfum facétieux, voilà qui serait une subversion joyeuse au sein de notre exposition, une éclatante singularité !
Clovis Lebénitier :
L’art de l’humour parfumé, une idée nouvelle qui flirte avec l’absurde, un rire qui s’épanouit dans nos narines !
Mgr Landriot :
Un rire olfactif qui chatouille les sens et stimule l’esprit, une exubérante comédie en odeurs !
(Un silence théâtral s’installe, évoquant une ambiance de réflexion profonde…)
Ah ! Seigneur dans quel siècle m’as-tu fait naitre ! Je prie Dieu et tous ses saints, principalement saint Richard, devant la « chimaera corona sanctus major». La petite croix est un signe de reconnaissance propre aux jésuites. Le saviez-vous cher professeur ? Cela me fait chaud au cœur de revoir cette petite croix, qui fleurissait jadis dans sur tous les monuments religieux.
L’avantage d’être interner dans un milieu psychiatrique, vous permet de continuer à penser à contre courant sans gêner à la doxologie, sans faire répandre le mal et la mort autour de soi. Je ne respire plus l’air vicié de ce monde et je n’entends plus les paroles de mensonges qui circulent dans les médias. En étant enfermés, je ne vis plus dans cette atmosphère de malignité malsaine qui vous poussent à penser et à agir contre votre gré. Je tiens à faire remarquer, que cet asile psychiatrique n’est pas assez grand pour contenir les fous dangereux qui sont assis sur le trône de la vengeance et de la mégalomanie. La surface de la planète n’est pas assez grande pour accueillir tous les projets délirants de ces fous, et pourtant s’ils savaient, ils n’agiraient point ainsi, mais ils préfèrent s’enivrer du vin de fureur de la grande prostituée de l’Apocalypse.
C’est dans cet établissement que je fis connaissance d’Arthur Sansonnet, le poète et critique de l’art contemporain. Des internés de ce centre m’ont fait lire, pour mon plus grand ravissement, les quelques poèmes de ce critique qui ont été diffusés sur votre site. Etant condamné à être interner dans ce centre de santé mentale, je peux faire dans l’antipathie et la répugnance sans être poursuivi pour provocation à la haine, comme le fit Victor Hugo en écrivant son livre « Les Châtiments. » Il considérait que c’est un devoir de féconder l’abomination et la malédiction. Il mit des rayons de lumière « dans un livre inclément », il outragea les ténèbres dans le but de faire surgir de ses imprécations, une lumière éclairant notre chandelle. C’est en contemplant la petite croix se camouflant dans la couronne que j’écrivis dans un état fébrile ce poème plein d’aigreur et de ressentiment. Car vous l’ignorer peut-être le christianisme est aujourd’hui réduit à une dimension et à une identité culturelle ! Il faut ajouter sans vérités métaphysiques !
Oh Hugo ! Quoique tu sommeilles
Nous t’appelons, nous les proscrits.
La culture postmoderne n’a pas d’oreilles
Et le véritable art est meurtri.
Toi, l’homme des « Châtiments » et de l’exil,
Délivre-nous de ces tous discours débiles !
L’art est mort ! Le public ? Un âne opiniâtre.
L’avant-garde ne deviendra pas jaunâtre
Comme l’art poussiéreux des musées ! C’est comme cela.
Hélas ! On a des gens pour soutenir et défendre cela.
Devant cette absurdité, l’homme sensé soupire.
Cet art, toujours d’actualité, fait sourire.
En attendant qu’il passe de vie à trépas,
La mort de l’art se prolonge en mardi gras.
Muse Indignation ! Viens ! Dressons maintenant,
Dressons sur ce Troisième Empire rayonnant,
Sur cette victoire de la bêtise gagnée,
La conclusion sur l’art qui ne peut durer !
Apportez vos chaudrons, vos tisons, sorcières de Shakespeare !
Sorcières de Goya ! Prenez-moi ce Troisième Empire
Dont l’art est en réaction avec le Second,
Dont la légitimité pose question.
Ils se veulent les héritiers du Salon des Refusés,
Avorton du Second, là est la réponse qui leur a échappé !
Retirez la part de l’art, ajoutez le parti pris,
Etre de l’Avant-garde éblouie !
Mettez l’analyse au sein de l’ignorance,
Tout homme devient artiste grâce à la performance !
Détournez avec une idée un objet industriel,
Avec rien, ajoutez la pensée conceptuelle,
Avec le tout, le monde devient lieu d’exposition.
Faites mijoter accumulations, simulations, installations,
Ajoutez à l’auto-légitimité, l’autonomie,
A l’auto-référentialité, l’ineptie.
Le mets semble réussi. C’est l’art et la vie !
Illimité est le champ de leur investigation.
Insignifiante leur réflexion.
Indéfinie leur autodestruction.
Infinie leur auto-crétinisation.
Penchez-vous crins épars, œil ardent, gorge nue,
Soufflez à pleins poumons, le feu sous la cornue.
Regardez le Troisième se dégage du Second.
Faites évaporer les auto-analyses qui comptent,
Faites revenir de ces débris, la chose qui corrompt,
Que reste-t-il au fond de l’alambic ? La honte !
Bandes de philistins gagnés par le néo-philisme !
Soyez maudits, conceptualistes, minimalistes !
Soyez maudits, nouveau-réalistes, néo-dadaïstes !
De faire perdre son temps à l’artiste !
De travailler au recul de l’esprit humain !
Du rameau d’or de Poussin, que reste-t-il ? Rien !
Soyez maudits, escrocs de l’art paradant au grand jour,
D’emplir de pensées malsaines, la part de l’art qui dure toujours !
Arthur Sansonnet m’envoya un email et s’exclama : « Ah ! Vraiment, quel plaisir de découvrir une pensée qui répond à son attente ! C’est un grand moment de liberté dans l’art ! C’est grâce au sublime romantique qui n’arrivait pas à se maintenir dans la finitude de l’entendement humain ou dans l’intelligence des sociologues et des structuralistes que l’on redécouvre la perspective d’une adéquation avec l’art. » Je lui répondis : « Seuls les génies de l’art sont capables de réconforter notre esprit et de redonner un sens à la vie. »
Mgr Landriot
Un jeune : « Je kiff votre poésie haineuse, avec ma meuf, et non ma teuf-teuf, nous bâfrons des jésuites, c’est trop bon ! On a même découvert des Paris-brest qui ont la forme circulaire de votre chimère. Nous pensons à toi Landriot. Quand nous faisons la teuf, on vous surnomme Rillaux, car votre nom Land’riot donne en français « Rillaux du pays », on boit, on fume, on bouffe en criant votre nom dans les rave-party. Je ne sais pas si tu es au courant, la déconstruction ait toujours à l’œuvre ; la force se réincarne quand elle allume le feu de la contagion. Les dômes de chaleur des météorologues se propagent partout, grâce aux raveurs. Notre langue se réduit aux sons et aux images, entre les deux, la langue a perdu son sens et la communication est devenue impossible, elle est préhistorique. Le dôme de chaleur attise le désir de Barthes à l’origine du « degré zéro de l’écriture. » Adieu, à l’écriture dirigée à l’avance par l’intention d’un discours socialisé. Bravo Rillaux du pays de donner du sens à ce qui n’en a pas. »
Mgr Landriot. « Cher monsieur, je n’avais point présumé m’engager à pratiquer une poésie haineuse, si la vérité de l’art ou, ce que le philosophe allemand, Heidegger nomme la « mise-en-œuvre de la vérité » chère à l’Eglise, n’avait été bafouée et ridiculisée par des ignorants, et soutenus scientifiquement et dogmatiquement par des sociologues. En prenant un intérêt à cette comédie avant-gardiste, mon dessein était seulement d’avertir les professionnels de l’art de leur erreur si patente. Je ne peux consacrer mon temps et ma raison aux causes de ces gouts qui se font et se défont. Je crus qu’un homme qui se mêlerait de railler tant de faux artistes et de mouvements artistiques contemporains serait obligé d’entendre des désobligeances excessives sur ce poème fielleux. C’est alors que j’eusse regretté de prendre tant de liberté dans le vain désir de restaurer la liberté en art. Mais ce ne fut pas le cas puisque des internautes se réjouissent à lire ce poème infâme. Auparavant, j’avais fait lire mon poème à quelques gens de l’asile psychiatrique, qui en avaient ri par la pertinence de mes propos, mais qui l’avaient regardé comme une bagatelle ou une futilité divertissante, qui ne pouvait nuire à personne. Ils étaient sous le charme de cette révélation inattendue. Dieu sait pourtant que le motif préalable était avant tout d’éclairer les sociologues et les professionnels de l’art qui acceptent tout sans savoir. Dans le cas contraire, où ce poème aurait été objet de scandale, j’eusse été condamné par les psychiatres à être censuré et interdit de toute connexion internet avec le monde extérieur, car l’asile n’a pas été accoutumé de répondre aux journalistes et a daigné accorder un tel honneur à cette catégorie professionnelle. Je suis avec tout le respect possible attentionné à vos missives. »
Mgr Landriot
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